Father.
Je vous hais. Il m'est difficile de vous exprimer la haine que j'éprouve à votre encontre. Vous m'inspirez le dégout le plus âpre et amer qu'il puisse exister ici bas. Pourtant plus jeune je ne rêvais que de vous, vous étiez le seul que je pensais véritablement aimer, je vous ai confié tous les secrets de mon coeur, je vous ai abandonné ma force, mon courage et ma douceur. Vous faisiez partie de mes priorités. Vous étiez le héros de mes songes et de mes nuits. Vous étiez la seule source de mon désir. J'ai toujours su qu'il y avait quelque chose d'anormal à ça, mais c'était pour moi le plus pur des régales qu'une enfant puisse avoir de celui qui était son père.
Je sais que mon incapacité à faire confiance est lié à vous, que l'impossibilité d'aimer tout Homme vient de vous. Tout provient du sentiment de culpabilité que vous avez fait enraciner chez moi depuis mon plus jeune âge. Vous avez fait murir en moi cette inconstance flagrante. Autrefois je ne faisais que vous bénir en vous remerciant pour tous les bienfaits que vous aviez eus l'honneur de m'accorder à moi pauvre et humble fruit de vos entrailles. De toute cette rage que vous avez implanté en moi je me réjouissais de pouvoir m'en servir tel un bouclier. Vous étiez mon chevalier.
C'est alors que lentement, le temps se fissure jusqu'à se briser. Avec l'âge je n'ai pu détourner les yeux de certaines vérités qui m'étouffaient. Vous êtes foncièrement mauvais. Je ne pense pas que vous en soyez conscient. Chez vous c'est comme une seconde nature, vous vous complaisez à faire du mal aux femmes. Je le sais et vous savez que je l'ai découvert. C'est en ce là que je vous effraie, n'est-ce pas ? Jamais au grand jamais, même contre la vie de l'un de vos enfants vous ne seriez humainement capable d'admettre une telle vérité qui vous dépasse. Vous avez aimé battre ma soeur, elle n'était qu'une adolescente perdue dans la quête d'identité, elle ne vous aimait plus alors vous l'avez frappé pour qu'elle se mette à genoux devant vous, pour votre plus grand plaisir.
Il est toutefois possible que face à l'obscure vision de votre main frappant sur son frêle corps de femme, mes souvenirs se soit effilés, tissant un abject toile trompeuses. Je n'ai pas l'outrance de dire que je suis parfaite, nous sommes loin de cela je vous assure father. Mais comment nier le pervers regard que vous avez toujours porté sur celles qui ont partagé votre vie ? Alors que ma tendre mère était accablée sous le poids de ses trois maternités, vous l'en avait détesté pour ça. Elle ne ressemblait plus à la jeune adolescente inconsciente et libertine que vous aviez connu par le passé. Elle était devenue une femme forte et pleine de caractère, elle était devenue ma mère. Et vous l'avez abandonné pour ça. Elle n'avait pas eu de père, c'est pour cela qu'elle vous a pris vous. Ce n'est certainement pas pour votre physique athlétique ou votre sens de l'humour qu'elle c'est donné à vous mais simplement pour combler un vide. J'ai beaucoup aimé la seconde femme qui a eu l'horreur de partager votre vie. Bien évidement vous l'avez prise plus jeune, bien plus jeune, sinon ça n'aurait eu aucun intérêt. Pareil à ma mère son père à elle n'avait pas été à la hauteur, c'est alors vous qui lui avait servi de remplacement. Mais vous en vouliez plus, ce qu'elle vous donnait ne pouvait suffire, vous vouliez une autre poupée à rajouter à votre collection, alors vous l'avait chassé. C'est par miracle que la troisième a eu la chance de combler toutes vos attentes. Grosse de vous bien avant de renvoyer la seconde, elle a fait votre bonheur. Mais cette fois vous déviez frapper fort, il fallait qu'elle soit la bonne, qu'elle reste pour toujours à vos côtés. Les années ne vous gâtées pas, vous deviez être aimé et dominer à jamais. Il a fallu que le père de la troisième meurt pour qu'elle vous accepte, à cette condition seulement elle avait eu besoin de votre répugnante présence près d'elle.
Vous me dégoutez, toutes ses femmes vous ont aimé, mais vous ne vouliez qu'une seule chose venant d'elle. Leur obéissance.
A présent je suis là, moi enfant de vous, comment ne serait-ce supportable de vivre avec un être tel que vous. Vous m'avez détruite avant mon arrivée au monde. Il se peut que pour moi le grand amour soit là et je peux vous promettre une chose père, c'est que jamais vous ne le rencontrerez. Vous ne le méritez pas. Si par malheur je me marie, ce ne sera pas vous qui me donnerez à mon futur époux, vous ne m'accompagnerez pas jusqu'à l'autel. Je m'y refuse. Si la simple idée d'avoir un enfant me répugne, c'est à cause de vous. Je ne supporterais pas de faire vire un enfant ayant ne serais-ce qu'une part de vos gènes. Je préfèrerais donner la mort à ce pauvre petit être qui ne voulait rien d'autre que d'être quelqu'un de bien. Quelqu'un qui ne vous ressemble pas.
On dit que les filles tombent amoureuse d'un homme étant l'égal de leur père. C'est pour cette raison que je prie chaque jour Dieu de me préserver de cette infinie souffrance. Car si par malheur mon amant venait à vous ressembler, je suis persuadé que la mort serait préférable. Ou si ce n'est la mort qui vient à moi, je ferais le premier pas.
Au fond il vous arrive d'être gentil. Je le sais, j'en ai à de multiple reprises était la victime. Mais le problème ne semble pas se trouver là. C'est que les fois où vous avez été bon avec moi, elles n'ont été là que pour mieux m'asservir, mieux me dresser. Car l'évidence se trouve entre mes cuisses... Je suis votre chienne.